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Harry CRUTTENDEN


Harry Cruttenden (1895-1914) par sa petite nièce Janet Stevenson (Août 2009)

Mon grand oncle Harry était né le 4 Décembre 1895, second fils et troisième enfant de William & Caroline (née Burgess) Cruttenden, qui résidaient Sandown Road, Ore (ndlr : à quelques pas d’Hastings, face à notre baie de Somme). Je présume qu’il est allé à l’école de Sandown Road, comme son frère aîné James William, mon grand père.

Le 26 Octobre 1912 il s’engage dans la Royal Field Artillery (Artillerie de Campagne Royale), affirmant avoir 18 ans et 1 mois (alors qu’il n’était qu’à 6 semaines de ses 17 ans). Son père avant lui, avait également menti sur son âge lorsqu’il avait rejoint la RFA en 1884, alors que son grand frère James William s’était engagé à 19 ans, en Janvier 1913.

Madame Murray de la Poste d’Ore produisit une lettre de référence à l’officier recruteur, attestant qu’elle le connaissait et l’avait employé pendant 3 ans, et qu’il était sobre et très honnête. Elle parue assez confuse lorsqu’on lui demanda la raison de son départ. Elle répondit qu’un jeune commis avec une moindre paie suffisait, ce qui démontrait qu’elle l’avait remercié pour économiser un peu d’argent. Il est possible alors qu’il se soit engagé par dépit, probablement ne sachant que faire d’autre.

Une note sur sa personnalité, datée du 30 octobre 1913, de son Officier supérieur, indique : « bon gars, intelligent, travaille proprement, mais enclin à la désinvolture ».

Je ne connais rien d’autre sur ses affectations jusqu’au 24 Août 1914, lorsque 35 batteries de 37 brigades furent engagées en France pour aider l’armée Française et la force expéditionnaire Britannique face à l’avancée Allemande en Belgique et en France. A 10 heure du matin le 26 Août, les 3 Batteries de la 37ème Brigade furent positionnées à environ 500 m à l’Est de Selvigny. Voici un extrait du journal de la 37ème Brigade pour ce jour là : « la 35ème Batterie ne tira pas depuis cette position, et vers 16 heures reçu l’instruction de se positionner en arrière pour couvrir la retraite. Alors qu’elle se déplaçait vers le Sud, ils furent bombardés, perdirent 1 homme tué, 2 blessés et un cheval tué. »

Ainsi s’acheva la vie de Harry, 18 ans et 8 mois, lors de la Bataille du Cateau, et, à part les médailles qui furent envoyées à ses parents juste après la guerre (British War Medal, Victory Medal and the 1914 Star), il fut oublié. Ceci est particulièrement vrai au vu du Monument aux Morts d’Ore, où un autre Cruttenden est listé par erreur, pas Harry. Mon père (également nommé Harry) a toujours défendu qu’il y avait erreur sur la personne, mais à l’époque ceci ne m’intéressait pas vraiment. La famille présuma qu’il avait été porté disparu, tué à l’ennemi, mais sans sépulture connue.

Il n’y a pas si longtemps que j’ai commencé à simplement me demander pourquoi mon grand oncle Harry avait été tué si tôt lors de la grande guerre, alors que naturellement il n’était qu’un cas parmi les quelques milliers à être tombés ces 6 derniers jours d’Août 1914.

C’est là qu’Internet démontra tout son intérêt … une simple recherche nous apprit qu’en fait il avait bien une sépulture, dans le cimetière communal d’un petit village français du nom de Caullery, à quelques kilomètres au Sud de Cambrai.

Dès que possible nous nous y rendîmes pour le trouver, et à notre grand étonnement, nous le trouvâmes, mais il n’était pas au milieu d’un de ces Cimetières Militaires si impeccablement entretenus, où des allées et des allées de noms devraient nous alerter sur la futilité de la guerre. Il était inhumé dans le cimetière local, seul soldat du lieu.

Je ne sais toujours pas pourquoi il fut enterré dans ce cimetière, je peux juste présumer qu’un des habitants du village trouva son cadavre, et qu’ils prirent l’initiative de l’inhumer là. Il est mentionné dans une enquête menée en 1922 par les préfectures françaises concernant l’occupation du secteur par les Allemands, où il est écrit : « Un soldat anglais, Henri Crutenden, un artilleur, y fut enterré après la bataille du 28 Août 1914 et un monument digne de lui, lui élevé par les soins de la municipalité »

Ainsi n’était-il pas complètement oublié. De nos jours, les habitants de Caullery, ignorent naturellement pourquoi Harry est parmi les leurs, et furent vivement intéressés par notre visite. Ils voulaient en connaître un peu plus à son sujet, et nous invitèrent, mon mari et moi, à revenir au mois d’Août. Un chic type insista pour que nous restions chez lui à Caullery, et durant tout le week-end nous fument traités avec une générosité et une gentillesse sans pareil.

Nous assistâmes également à une cérémonie annuelle à la ville de le Cateau, organisée par le Maire et l’Armée pour commémorer la bataille, se souvenir et remercier les soldats Britanniques qui moururent ici au combat, il y a bien des années.

Ainsi, une nouvelle fois, nous découvrions qu’Harry et tous les autres n’avaient pas été oubliés et ignorés. Sur le chemin du retour, Monsieur le Maire du Cateau nous invita à un pot organisé à l’hôtel de ville, et nous fit cadeau d’un livre sur le Cateau d’aujourd’hui.

Quand nous sommes retournés sur la tombe d’Harry, le 26 Août, 93 ans jour pour jour après qu’il ait été tué, nous y avons rencontré un vieil homme qui nous apprit qu’en même temps que Harry, trois soldats Allemands avaient été enterrés comme lui dans le cimetière … L’un fut repris par sa famille après guerre et rapatrié en Allemagne, et les deux autres furent déplacés dans un cimetière militaire Allemand des environs. Nous nous y sommes rendus pour voir leurs tombes, alors que nous étions sur place.

Harry, quant à lui, fut abandonné là. Au départ j’étais triste de le savoir oublié là, durant toutes ces années, mais finalement, en me voyant dans ce paysage, je pense qu’il ne pouvait trouver plus belle dernière demeure. On m’a dit que chaque 11 Novembre, les villageois fleurissent sa tombe, une information qui m’a beaucoup touchée, d’autant plus que je sais qu’aucun membre de sa famille proche n’a jamais pu visiter sa tombe, ne sachant pas qu’il en avait une.

Malheureusement, à ma connaissance, il n’existe pas de photographies de Harry, aussi nous ne savons même pas à quoi il pouvait ressembler.

Si d’aventure quelqu’un lisant ce document pouvait me donner plus d’informations concernant Harry, je l’écouterais avec grand intérêt.

Janet Stevenson, petite-nièce de Harry, rencontrée à Caullery en Août 2007

Document traduit de l'anglais par Philippe Cattelain


* Soutien aux Soldats sur le Poppy Shop de la Royal British Legion


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