Le Domaine curial. - Terres de l’Eglise et des pauvres. - La vie religieuse. – Le presbytère, le cimetière. – Les prêtres originaires de la paroisse.

Pour subsister sous l’Ancien régime, les curés ne pouvaient compter que sur la part de dîme que leur réservaient les collateurs de la cure. A Caullery, la dîme revenait à l’abbaye d’Honnecourt, qui la faisait percevoir par des fermiers. On en connaît au moins deux : Jehan Lamouret en 1592, Arnould Bonneville en 1618 ;

La dîme était un impôt sur les récoltes de blé ou d’avoine de six ou sept gerbes au cent, destiné en principe à l’entretien des ecclésiastiques, bien que, pendant de longs siècles, des seigneurs laïques l’ont usurpé à leur profit. La part qui revenait au curé s’appelait vers le XVIIème siècle la portion congrue, c’est à dire la part qui convenait à son entretien. A cela il faut ajouter le revenu des terres qui appartenaient à la cure, par donation ou par acquisition, puis le revenu des terres destinées à soulager les pauvres et à l’entretien de l’église.

On ne sait pas exactement ce que représentait en mencauds de blé le revenu annuel de la dîme allouée au curé, à laquelle il faut ajouter les fermages des terres qui constituaient le domaine curial. Dans l’adjudication qui en fut faite le 21 mai 1791 par le District de Cambrai à Alexandre Bugnicourt au nom de la communauté, ce domaine était évalué à 40 mencaudées 50 verges. Il fut acquis pour 5.380 francs. Alexandre Bugnicourt déclara pour command Etienne Bourlet, qui en eut les deux tiers et la communauté l’autre tiers. Le prix d’achat ne fut totalement réglé que le 16 janvier 1810, par le versement d’un reliquat de 3.456 francs.

De ces terres, le curé était occupeur de 4 mencaudées et demie qui aboutissaient à une sorte de redan naturel, abondamment garni de prunelliers sauvages, qu’on appelle encore " crinquet du curé ", près du chemin du Périzet, face à l’autre crinquet, beaucoup plus important, qui domine à l’ouest " la vallée à Corbeaux " ou plutôt " encore bos ", comme c’était le cas au XVème siècle ; c’est au pied de ce " grand crinquet " que passe la Warnelle, autrefois torrent impétueux qui a creusé la vallée, aujourd’hui filet d’eau intermittent à peine visible.

Ce domaine curial devait comprendre aussi les terres de la cure de Caullery qui se trouvaient sur Ligny, Selvigny et Clary.

Sur le terroir de Caullery, en plus de cette terre occupée par le curé en 1791, on ne connaît, d’après les anciens textes, qu’une pièce d’un demi-muid ou 8 mencaudées, située également auprès du chemin du Périzet, et une autre pièce située près de la voie de Clary, contenant 3 mencaudées voisines de 3 mencaudées de la cure de Clary, de 12 mencaudées de la cure de Walincourt et de 2 mencaudées des pauvres de Caullery (A.D.N. L. 5055) ; Dans ce total de 40 mencaudées, mentionnées à la Révolution, il faut sans doute comprendre les terres qui appartenaient à l’église de Caullery.

D’après la déclaration faite au commencement de 1790, par le maire Joseph Bourlet au District de Cambrai (A.D.N. L. 6979), les pauvres de Caullery ne possédaient que 5 mencaudées de terres labourables, dont le revenu était augmenté de " 64 florains que le sieur curé donne aux pauvres tous les ans provenant du bien dit annone occupé par le Chapitre de la Métropole de Cambray ". Ce bien annone voulait dire une part du blé qui revenait au Chapitre.

Quoi qu’il en soit, les terres des communs pauvres qui étaient administrées en même temps que celles de l’Eglise, par les marguilliers, pères de l’Eglise, pères des pauvres, firent l’objet, en mai 1789, d’une location publique par adjudication au plus offrant, au temps du mayeur Pierre Lestoquoy, en présence des échevins Eugène Dienne et Pierre-Joseph Leduc, et de Pierre-Henry Mairesse-Delattre, qui représentait l’église de Caullery comme marguillier et père des pauvres.

Ces 5 mencaudées tenant de lisière au chemin du Périset, d’un bout au chemin de Caullery à Cambray, furent adjugées l’une pour 12 mencauds de rendage, plus " 10 sols pour l’écrivin ", c’est-à-dire le greffier, à Jacques Pezin qui avait pour caution Charles Pezin. La suivante aux mêmes charges, à Grégoire Carlier qui avait pour caution Antoine Quenesson. La troisième y joignant était reprise pour dix sols aussi à " l’écrivin ", mais pour 8 mencauds et demie à Maximilien Laude, maréchal, dont la caution était J.-B. Boniface.La quatrième, pour les mêmes charges, était transférée de Maximilien Laude à Louis Lamouret, à qui J.-B. Boniface servait aussi de caution, tandis que la cinquième tenant de lisière à Antoine Mairesse était louée à Charles Bourlet qui avait pris pour caution Henry-Joseph Bourlet.

La recette des pauvres portait " 49 mencauds et demy ". En même temps, on avait loué une razière, terre de l’Eglise, tenant du chemin de Ligny à Selvigny, à Charles Segart, à raison de " 15 sols pour l’écrivin " et 16 mencauds et demi ; Jean Quenesson servait de caution.

Une autre mencaudée, terre aussi de l’Eglise, tenant à la précédente razière à 5 mencaudées des pauvres et audit chemin, était louée à Maximilien Laude, dont J.-B. Boniface était caution pour 12 mencauds et 10 sols pour " l ‘écrivin ". (A.D.N. L. 5055)

C’est en 1616 au temps du mayeur Jehan Lamouret, que l’on rencontre pour la première fois une adjudication des terres de l’Eglise et des pauvres de Caullery.

Par l’ordonnance de " Messieurs curetz maieur et eschevins, pour le grand prouffict de l’Eglise et pauvres ", on avait annoncé " le passement au plus offrant et dernier enchérisseur, en matière accoustumée, de plusieurs pièches de terres labourables " tant de l’Eglise que des pauvres, " pour noeuf ans continuels et enssuivant, pour commencher à binotter une partie prestement et les aultres après l’aoust prochain, sans les livrer à corde ou à mesure ". Les preneurs devraient payer le prix de la demeure ou adjudication, " en bon bled, bien battu et vanné, sec et sain , où il plaira à Messieurs ou leurs commys, à francquet, boisteau, demi-boisteau, demy-boite, pinte et demy-pinte, de même mesure que celles du Chastel en Cambrésis, mesure dudit lieu, avant la Saint Andrien 1618 pour celles à binotter prestement, et pour les autres de l’année 1619 ". Les preneurs devraient, en outre, s’engager à bien fumer et cultiver ces terres, sans les déroyer, c’est-à-dire en respectant la roye. On sait que la première roye, c’est-à-dire culture, était en blé, la seconde en grain de mars, la troisième roye ou année était jachère ; on n’avait pas le droit de changer cet ordre de culture. L’enchérisseur devrait avoir " de quoy payer à péril de les repasser à ses despens et de paier le fol enchère ". De même, " de remonter lesdites terres de chascun costé d’ung boisteau ou de deux pinttes et non de moins, et de lever le bail (c’est-à-dire faire écrire le bail), en dedans quarante jours sous péril de soixante sols d’amende au prouffict de l’Eglise ".

De plus, les preneurs étaient tenus de payer pour vin, avant la Saint Rémy (1er octobre), au profit de l’Eglise, vingt-cinq patars de chacun mencaud " et deux pattars et demy pour les droicts de messieurs tant de l’Eglise, que des pauvres qu’il se doibt présent paier incontinent le recours faict et passez ". C’est ainsi que le 25 novembre 1616, " après yssue de grand messe paroichialle, à la bertecque (balcon), en la présence de sire Anthoine Doien curetz, Jean Lamouret maieur, grégoire Labbé, Pierre Taisne et Pierre de Gorre comme eschevins avecq eulx Gille Paien et Paul de Proy mainbours marguilliers de ladite église " furent adjugées les terres suivantes :

D’abord celles appartenant à l’église ; " trois mencaudées nommez le cam Jallain tenant en lisière au chemin de Clary à Walincourt demouré à Parys Sohier pour sept boisteaux et demi-pintte la mencaudée, cinq boistellées nommées les cinq boistellées de la carrière tenant au chemin qui maisne de Clary à Walincourt, au chemin menant à Caullery et à 3 mencaudées de Jean Lamouret, demouré à Gille Paien pour 3 boisteau la mencaudée et sans vin (on a reconnu facilement qu’il s’agissait de la terre crayeuse dite carrière autrefois J.-B. Claisse) ;

Une mencaudée et demie " tenant à demy muyds de la cure d’aultre lisière a demy mencaudée de Pierre Taisne, et de deboult à 2 mencaudées de l’église, pour jouir du mars prestement et le laisser ainsy a mars demouré à Anthoine Taisne pour deux mencauds et demi la mencaudée ;

Deux mencaudées tenant en lisière à demy muyds de la cure, de deboult à 3 mencaudées de Jean Lamouret, demouré à Jean Lamouret pour deux mencauds et demi chacune mencaudée ;

Aultre 2 mencaudées, tenant à 3 mencaudées qui fust Jean Daix à présent Anthoine Sartier, de deboult a 2 mencaudées de la cure, demourez a Gilles Paien pour 2 mencauds et demy chacune mencaudée ".

Mencaudée et demy tenant à une mencaudée de Philippe Ramette de deboult au chemin du Périset, demouré à Melchior Taisne pour 3 mencauds et demy la mencaudée.

Une mencaudée tenant a une razière dessus escript, de lisière au camp des pauvres et au chemin du Perizet, demouré à Jean Sohier pour 3 mencaux et 5 boisfeau ladite mencaudée.

Onze boistelées tenant des deux lisières aux terres de messieurs de Chappitre, demouré à Philippes Ramette pour 3 mencaux bled.

Trois mencaudées tenant à 12 mencaudées de l’église de Wallincourt de lisière à 3 mencaudées des pauvres de Clary, de l’aultre deboult à une rasière de la Cure, demouré à Pierre de Gor pour trois mencaux la mencaudée ".

Puis la terre appartenant aux pauvres " pieche de cincq mencaudées tenant en lisière au chemin du Périzet, d’aultre a trois mencaudées de Jean Lamouret et de deboult au chemin de Cambray, demouré à Arnoulx de Bonneville pour trois mencaus et demy la mencaudée " (Archives du ferme de Caullery).

Au seuil de la Révolution, le 26 décembre 1790, " au son de la cloche, en présence de Jacques-Joseph Dehollain, curet, Joseph Bourlet maire, Jean-Baptiste Lor procureur, P.-J. Delbart et Etienne Quennesson municipaux, a 3 heures après-midi, à la requète du procureur de la commune, au plus offrant et dernier enchérisseur à charge de fumer une fois au moins pendant le bail à peine de 12 florains la mencaudée, de payer le rendage à la Saint André 1791, fournir caution suffisante, verser 10 patars par mencaudée pour le greffier et 15 sous pour droits d’affiche et passement " étaient adjugés pour neuf ans les biens suivants de " l’Eglise de Collery " :

Cinq boitellées tenant de lisière au chemin de Caulery à Elincourt, d’autre au chemin de Clary à Selvignies, d’un bout à une boitelée de Martin Mairesse étaient laissées à Jacques Pesin, qui avait pour caution Etienne Pézin, à 2 mencauds la mencaudée.

" Trois mencaudées tenant de lizière au chemin qui conduit de Selvignies à Clary, aux terres occupées la veuve Mairesse, d’un bout aux terres Antoine-François Mairesse " étaient adjugées à Théodore Leducq qui avait pour caution Alexandre Arpin. C’est ce dernier qui semble avoir servi de greffier (A.D.N., L. 5055).

" Le 7 novembre 1791, après publication au prône de la messe paroissiale pendant trois dimanches consécutifs, à la requête de Jean-Baptiste Lor, procureur, du maire Jospeh Bourlet, en présence du sieur Noël Déjardin, prêtre et curé à ce convoqué ", avait lieu une nouvelle adjudication de dix pièces de terres. Les preneurs devaient " payer 20 sous par mencaudée, pour affiches et papier d’écriture, passement et droit du greffier, présenter caution suffisante, et fumer une fois pendant le bail, à peine de 15 livres par mencaudée, et acquitter le rendage tous les ans à la Saint André ".

Il s’agissait de " onze boistellées tenant à 20 mencaudées du ci-devant Chapitre de N.-D . de Cambrai, " au dos pourceau ", qui furent laissées à Ch. Seguard pour 10 mencauds la mencaudée ; Etienne Ramette était la caution.

" Deux mencaudées au terroir de Ligny tenant à celui de Caulery et aux terres ci-devant, laissées à Etienne Bourlet pour demi mencaud la mencaudée ". Antoine-Joseph Quennesson lui servait de caution.

" Une mencaudée nommée " le dos de pourceau " tenant aux dites 11 boistellées et 20 mencaudées, laissée pour 9 mencauds et demie à Raphaël Valiant ", qui présentait pour caution Pierre-Charles Ramette.

" Deux mencaudées faisant moitié de 4, tenant à 3 mencaudées de la ci-devant cure de Caulery, d’autre à 3 mencaudées de la ci-devant cure de Clary, adjugées pour 3 boiseaux la mencaudée " à Théodore Leducq ", qui avait pour caution Alexandre Arpin.

" Deux mencaudées tenant aux précédentes et à 12 mencaudées de l’église de Walincourt, laissées à Pierre-Henry Mairesse-Delattre ", qui avait pour caution Jean Quennesson, à raison de 9 boisseaux la mencaudée.

" Deux mencaudées tenant à 6 mencaudées dit le champs Burrit et à 2 mencaudées des héritiers Ch. Quennesson, laissées pour 1 boisseau la mencaudée à Etienne Bourlet ayant pour caution Antoine-Joseph Quennesson. "

" Deux mencaudées tenant à 2 d’Antoine Quennesson, à 8 mencaudées de la ci-devant cure de Caulery, adjugées, pour 9 mencauds et demi la mencaudée, à Pierre-Joseph Mairesse ayant pour caution Etienne Delbart, J.-B. Carlier et Joseph Bourlet, consors. "

" Une rasière tenant aux 2 précédentes et aux 8 mencaudées de la ci-devant cure de Caulery, laissée à 9 mancauds la mencaudée à Jacques Pezin dont la caution était Etienne Pezin. "

" Deux mencaudées tenant à une de feu Paul Leducq, à 9 boistelées occupées par Michel-Antoine Quennesson et Joseph Bourlet, et à 2 mencaudées de feu Nicolas Mairesse laissées à 6 mencauds la mencaudée à Henry Bourlet et consors, caution Antoine-Joseph Quennesson, André Bourlet. "

Finalement, " deux mencaudées tenant d’une lizière à une mencaudée occupée par P.-Joseph Mairesse, aux terres occupées par la veuve Mairesse Sellier, d’un bout au chemin de Selvigny à Clary, laissées pour 2 mencauds et 10 pintes la mencaudée à Jacques Pezin qui avait Etienne Pezin pour caution ".

L’adjudication est signée par Joseph Bourlet, maire, et J.-J. Delbart, municipal, J.-B. Lor, procureur, et Henri-Joseph Bourlet, secrétaire greffier. Le curé constitutionnel n’a pas apposé sa signature.

A part le nombre de baptèmes, mariages ou sépultures, on ne possède guère de renseignements sur la vie religieuse des habitants de Caulery avant la Révolution.

Sans doute, on sait, par la publication faite en 1869, par Le Glay, du pouillé ou relevé des paroisses du diocèse de Cambrai au XIVe siècle, que la paroisse de Caullery faisait partie du décanat du Cateau, avait pour collateur, c’est-à-dire l’ayant-droit à la nomination ou présentation du curé, l’abbaye Saint-Pierre d’Honnecourt, et devait payer chaque année à l’évêque une taxe de 10 livres.

Clary était taxé à 20 livres et avait pour patron Saint Quentin. Mais Caullery avait pour patronne la Vierge Marie dans sa Nativité, et la dédicace ou ducasse s’en faisait chaque année le 8 septembre, jour de la fête, ou le dimanche qui le suivant immédiatement.

Par la suite, vraisemblablement au milieu du XIXe siècle, la ducasse unique fut scindée ; on fit une première fête au dimanche qui suit la Saint-Jean d’Eté, en juin, et l’on arriva à considérer comme fête patronale celle du deuxième dimanche d’octobre, plus communément appelée fête de Saint-Roch. En fait, la Vierge Marie, dans sa Nativité, est toujours la patronne, mais on connaît la grande dévotion des habitants de Caullery envers saint Roch, qui les a protégés spécialement du choléra en 1832, bien que l’on ait enregistré 32 décès cependant au cours de l’année.

A vrai dire, la dévotion envers Saint Roch doit remonter avant la Révolution, car l’abbé Plouvier note que l’ancienne confrérie de Saint-Roch fut rétablie en 1838 par le curé Canyn.

Les circonstances allaient, quinze ans plus tard, renouveler la dévotion envers Saint Roch, dont l’abbé Plouvier, en 1853, venait de faire bénir une nouvelle statue qu’il faisait décorer, comme celle de la Sainte Vierge, suivant les procédés du Moyen Age.

Cependant, l’année 1854 fut parmi les plus sombres dans l’histoire de la paroisse. On y enregistre 50 décès, dont 3 mort-nés, et le choléra fut le principal fournisseur de la Mort, surtout dans les familles pauvres sous-alimentées de la ruelle du Moulin principalement, où l’abbé Plouvier note que certaines ne se nourrissaient que de betteraves.

Chaque année, on brûlait devant la statue de saint Roch, des cierges ou cirons, sous le contrôle de deux membres de la confrérie, qu’on appelait cironniers, et qui étaient renouvelés chaque année. Mais cette nomination amenait tant de désordres, principalement dans les cabarets, que l’abbé Plouvier, en 1853, avait décidé de retirer les cirons de l’Eglise et qu’il n’avait plus consenti au renouvellement des cironniers qui étaient Prosper Delattre et Marcel Pelletier.

De là vint un certain mécontentement parmi la population qui regrettait, d’autre part, son ancienne statue qui avait été cédée en même temps à Montigny.

L’année 1854, note l’abbé Plouvier, commence mal. Il y a de tels amas de neige que la circulation entre villages est presque impossible. Le courrier doit venir à pied, les dépêches arrivent le lendemain, les voitures sont arrêtées et abandonnées dans la neige. Les ouvriers qui reportent leur travail au dehors se perdent ; l’un d’eux même tombe dans un trou à marne entre Clary et Serain et doit y laisser sa charge. Le pain renchérit jusqu’à 25 centimes, les pauvres sont aux abois, mais le commerce, c’est-à-dire le tissage, marche bien.

Il n’est donc pas étonnant que le carnaval fut bruyant à tel point que, pour éviter les désordres du mardi gras et du mercredi des Cendres, où les masques, avec des épées, des bâtons, insultaient les passant et forçaient l’entrée des maisons, que le maire, au nom du titre XI de la loi du 16 au 24 août 1790, interdit ces réjouissances.

Et voici qu’au commencement d’octobre, le choléra s’annonce. Au 2 novembre, il y a 15 décès parmi les catholiques ; il y a encore 15 malades, dont 5 protestants.

L’effroi des paroissiens est grand ; on commence une neuvaine à saint Roch, on émet une souscription qui rapporte immédiatement 650 francs pour faire une chapelle sous le vocable du saint. Mais le 3 novembre, 3 décès ; le 4, encore 2, ainsi que le 5, et le 7 novembre, 6 morts sont connus.

C’est alors qu’une députation, le 9 novembre, " ignorante, dit l’abbé Plouvier, accueillant l’idée superstitieuse que le fléau est dû au remplacement de l’ancienne statue de saint Roch, vient au presbytère demander de descendre la nouvelle statue pour rétablir l’ancienne ". Elle se heurte au refus de l’abbé Plouvier qui ne pouvait donner suite à ce caprice, mais ne réussissant pas cependant à faire comprendre que le fléau est une punition indépendante d’une statue ancienne, lui dit de s’adresser pour cela à Mgr l’Archevêque, aux ordres duquel il obéira.

Le 13 novembre, c’est un Arpin de la ruelle du Moulin qui meurt ; Pierre Doucet, dit Pierre Tranquille, le 14 ; Célestin Vitoux, le garde, la femme du vieux garde Mairesse, ruelle de la Toffette, et le 16 novembre, Aimable Quennesson, " l’un de ceux qui étaient venus pour la réhabilitation de saint Roch ".

Cependant, le Sous-Préfet s’est inquiété ; le médecin qu’il a envoyé est parti, après avoir contrôlé, sans apporter de remède. Finalement, le 22 novembre, deux nouveaux cas se terminent par décès dans la ruelle du Moulin, où, le 27 novembre, le dernier malade arrive cependant à guérir, tandis que l’abbé Plouvier note avec satisfaction qu’après sept semaines le fléau est fini comme il a commencé dans la ruelle fatale du Moulin, par un temps de froid excessif.

Ce ne fut qu’en 1856, le 12 octobre, avec un cortège magnifique, par un soleil brillant, que fut bénie la chapelle érigée sur le chemin de Ligny en l’honneur de saint Roch.

On avait acheté un bout de terrain sur lequel avait grandi un vénérable tilleul dont le bois fut utilisé par Joseph Chevalier et Onésime Langlet pour faire la charpente. Tout entière bâtie en pierres de taille, la chapelle avait été faite pour 250 francs par un tailleur de pierres du village d’Hordain, Pierre Tison.

L’ancienne statue de saint Roch, que l’on vénérait sans doute depuis le XVIIIe siècle, y fut replacée. Classée actuellement parmi les monuments historiques, elle est chaque année l’objet d’un pèlerinage au deuxième lundi d’octobre, où viennent les nombreux paroissiens de Caullery et les fidèles des paroisses voisines.

On sait qu’actuellement une certaine partie de la population appartient à la religion réformée ou protestantisme. A quelle date peut-on faire remonter cette adoption qu’une partie des familles Leducq, Quennesson, Arpin semble avoir professé officiellement ainsi que les familles Cattelain et Pochet dans le commencement du XIXe siècle ?

Au XVIe siècle, lorsque les habitants du Cateau en 1566 s’étaient soulevés contre l’Archevêque de Cambrai pour adopter la nouvelle religion que les prédicants leur apportaient de France, on note au 28 novembre (Ms 1074, f°61 v°) que le Chapitre envoie enquête à Caullery son Bailli au sujet " des grandes infractions et autres insolences faites par les Huguenots quelques jours auparavant ". Sans doute, les esprits avaient-ils été surexcités aussi par les prêches de la cène qu’on avait célébrée à Prémont le 5 juin précédent. Mais il semble que tout soit rentré dans l’ordre. Vers 1740, le Chapitre s’inquiète de voir s’implanter à Caullery certaines familles sans son autorisation, mais sans qu’on en donne la raison.

Il faut plutôt croire que c’est au moment même de la Révolution, sinon quelque temps auparavant, que certains habitants de Caullery professèrent la religion calviniste, sous l’action de Jean de Wisme, qui dès 1783, installé à Quiévy, rayonnait aux alentours jusque Saint-Quentin. Profitant de la tolérance que lui portaient les hommes de la Révolution pour propager la doctrine, il a pu être considéré plus tard par ses adeptes comme le réorganisateur des églises protestantes du Nord de la France, sous la Révolution et l’Empire. On sait que le pasteur actuel qui régit Walincourt, Cambrai et Caullery s’appelle aussi de Wisme.

Quoi qu’il en soit, les registres de l’état civil, en février 1813, notent le décès de Jean-Baptiste Leducq, âgé de 86 ans, alors qu’il n’en est pas fait mention dans les registres paroissiaux de l’Eglise. Il était le fils de Martin et de Marie-Reine Bauduin, qui s’étaient mariés le 3 mars 1714 en l’église de Walincourt, où leurs témoins avaient été Jean-Nicolas Mairesse et Michel-AntoineLeducq. Jean-Batptiste Leducq avait eu pour parrain J.-B. Mairesse le 3 avril 1726. Il avait été mayeur de Caullery de 1759 à 1773 ; son père, Martin, avait été enterré dans l’église de Caullery à l’âge de 72 ans, le 21 mai 1754, à côté de sa femme, M.-R. Bauduin, qui y avait été inhumée le 13 mai 1753.

Cette omission, dans les registres paroissiaux, de l’enterrement à l’église de J.-B. Leducq, d’autant qu’il était le beau-père de Maurice Doles, le clerc de l’époque, peut-elle signifier d’une façon probante son appartenance à la religion réformée ? C’est possible. En tout cas, l’almanach de Cambrai, édité pour l’an 1809 à Cambrai, chez Hurez, note bien qu’il y a deux oratoires du culte protestant ouverts dans le courant de l’an XIII avec l’autorisation du Gouvernement, l’un à Quiévy, l’autre à Walincourt. S’il nomme parmi les membres du Consistoire de Quiévy Joseph Lorriaux du même lieu, et parmi ceux de l’oratoire de Walincourt, J.-B. Cattelain de Walincourt, J.-B. Louchard et Michel Dégremont d’Elincourt (ce dernier était petit-fils de Michel-Antoine Mairesse et de Marie-Catherine Quennesson de Caullery), par contre il ne fait aucune mention de personnes de Caullery parmi les membres du consistoire de Walincourt. D’après encore cet almanach, " le nombre des habitants de l’arrondissement de Cambrai reconnus pour professer le culte protestant était de 1668 en l’an XII (1804 "(pp.72,73).

En tout cas, J.-B. Leducq, garde-champêtre, fut témoin le 9 mars 1811, lorsque " J.-B. Cattelin, 25 ans, mulquinier à Selvigny, né à Walincourt de Pierre et de feue Marie-Rose Roussiez, épousa Marie-Catherine Bugnicourt, âgée de 25 ans, fille d’Alexandre, meunier, et de Marie-Joseph Dron ". A ce mariage, qui ne paraît pas dans les registres de l’église, était aussi témoin " Benjamin Cathelain ", frère de l’époux. L’on a vu que Ch. Dolez racontait au curé Plouvier que c’était au temps de l’abbé Pagniez, entre 1804 et 1811, que le protestantisme s’était implanté à Caullery... La première mention officielle de l’existence à Caullery du culte protestant st une délibération du Conseil municipal du 6 novembre 1843, qui, sur lettre du Sous-Préfet du 8 octobre précédent, vote une somme de 15 francs comme quote-part des frais de logement du pasteur protestant, frais demandés par le Consistoire Général du culte réformée et répartis entre les communes intéressées.

En 1855, nouvelle mention, cette fois, à propos du lieu du culte protestant ou temple. Le Sous-Préfet, par une lettre du 21 juin précédent, provoquée par une délibération du " conseil castral " du culte protestant, demandait à la commune le paiement de la somme de 211 fr. 50 pour réparations au Temple protestant. Le Conseil municipal, dans sa session extraordinaire du 4 juillet, rejette cette demande parce que le Temple est propriété privée et n’appartient nullement à la commune ".

Au 18 octobre, sur réponse faite par le Préfet du Nord le 5 précédent et dont " l’objet est de mettre à la charge de la commune l’entretien du bâtiment servant de réunion aux protestants de Walincourt qui habitent la commune de Caullery, le Conseil découvre enfin que le bâtiment ou temple est propriété consistoriale ". " C’est ce qu’il ignorait jusqu’à présent et qui a fait rejeter la demande de juin dernier ". " Mais il voit que le devis est exagéré dans plusieurs de ses parties. Il se réserve de le faire rectifier, s’il y a lieu, et portera sur le budget de l’année prochaine les sommes nécessaires ", puisque, d’après la lettre du Préfet, " la commune de Caullery doit venir en aide aux réparations de ce bâtiment comme de tous ses autres édisfices publics ". Finalement, bien qu’il ait obtenu, en date du 31 octobre, l’autorisation du Sous-Préfet de faire établir un nouveau devis des réparations au Temple protestant, parce que celui du pasteur Walloton, dressé le 5 mai précédent, lui avait paru exagéré, le Conseil, sur l’avis des trois membres qu’il avait chargés de l’affaire, accepte le devis contesté et vote, le 19 novembre, la subvention demandée de 211 fr. 50.

Puis, le 17 novembre 1859, le Conseil charge le Maire, Charles Dolez, de signer, auprès de la Caisse générale des assurances agricoles, une police de 30.000 francs, valeur à laquelle il estime l’ensemble des bâtiments communaux, église, presbytère, maison d’école et temple protestant.

A l’origine, l’église de Caullery était, on le sait, sinon entourée du cimetière, mais très proche. Dans l’église même, on inhumait certaines personnes, seigneurs (on se souvient de la tombe d’un sire de Caullery, retrouvée à l’emplacement de la vieille église), mayeurs, certains membres de leur famille, et les curés. C’était ce qui représentait, à l’époque, les concessions à perpétuité.

Par souci d’hygiène, une loi du 15 mai 1776 interdit désormais les inhumations dans les églises.

A partir de 1726 jusqu’à cette interdiction, en plus des curés Chimot et Leclercq, qui furent enterrés dans l’église, les registres paroissiaux mentionnent une douzaine d’autres personnes : André Du Bois, qui descendait des anciens seigneurs de Caullery ; Jean-Baptiste Mairesse, mayeur, et sa femme Marie-Anne Le Febvre, ses frères Pierre Mairesse et " honorable homme " André Mairesse, Martin Leducq, mayeur, sa femme et Marie-Reine, leur fille ; Jacques Lestoquoy, mayeur, époux de Jeanne-Marguerite Mairesse. La dernière inhumation de ce genre est celle faite le 20 mars 1770 de Jean-Nicolas Mairesse, " libre et vivant de son bien fils des feus Jean-Baptiste et Marie-Anne Le Febvre ".

Quelques habitants de Caullery doivent encore avoir le souvenir du vieux cimetière qui dressait, au milieu de la place verte, sa butte toute embroussaillée d’arbustes, sapins, sureaux, ormeaux et de touffes d’orties qui masquaient les pierres ou les croix de fer branlantes, marquant l’emplacement des tombes délaissées.

Limité par des débris de palissages et par deux ruelles qui permettaient d’en faire le tour, l’une longeant la propriété Grière-Ramette, auparavant Henry Bourlet, l’autre cotoyant la grange et les étables de l’ancienne ferme de Jean-Baptiste Thelliez, le cimetière avait sa porte d’entrée en gradin, vers la grand’rue.

Lorsqu’au sortir de l’école, les enfants n’étaient pas attirés dans la rue d’En-Bas par les acrobaties des charpentiers scieurs de long, qui, l’un sur le corps d’arbre, l’autre en dessous, s’escrimaient à débiter les planches pour le charron voisin, ou qu’ils n’étaient pas appelés par les sons précipités ou prolongés des coups de marteau que le maréchal-ferrant et ses aides donnaient à grand renfort de muscles sur les bandages des roues en fer qu’ils montaient pour les charrettes, tombereaux et chariots, ces écoliers libérés envahissaient le vieux cimetière, qui était le théâtre rêvé de leurs jeux bruyants, au grand désarroi des nombreuses volailles du voisinage qui en avaient fait leur refuge paisible, principalement les oies de Catherine Thelliez, la veuve d’Henry Leroy.

Quelque temps avant la guerre de 1914, on l’avait nivelé et fait disparaître complètement. La salle des fêtes actuelle a été construire en grande partie sur son emplacement. Vers 1890, il avait été remplacé par le nouveau cimetière, plus vaste, établi au chemin de Bohain. Mais, jusqu’à cette époque, sa surface, évaluée dans le cadastre de 1811, à quatre ares un centiare, avait suffi à la population du temps.

C’est ce que faisait remarquer le Conseil Municipal dans sa délibération du 16 mai 1861. Le 16 avril, le Sous-Préfet de Cambrai avait rappelé les dispositions du décret du 23 Prairial an XII, qui exige que les cimetières soient transférés au dehors des agglomérations, ainsi que l’ordonnance du 6 décembre 1843, qui contient les règles relatives à l’établissement des concessions, " le Conseil considérant que depuis l’établissement du cimetière qui remonte à un temps immémorial, on n’a jamais remarqué aucune émanation désagréable.

" Dans ces conditions de situation et de clôture où il se trouve, il ne peut y avoir la moindre chose à craindre, aussi bien sous le rapport de la salubrité que de la morale ; d’ailleurs, les habitations les plus voisines en sont séparées par des rues et d’autres bâtiments.

" Il a toujours suffi, puisque les fosses n’ont jamais été rouvertes à moindre intervalle que de huit à dix ans.

"  Enfin, le manque de ressources de la commune et la difficulté d’onérer pour un objet considéré comme n’étant d’aucune utilité jusqu’ici, et en outre le produit des concession est et sera longtemps nul, puisque la famille ne se compose que de familles peu aisées. C’est pourquoi le Conseil prie M. le Sous-Préfet de vouloir bien lui permettre d’ajourner cette translation.

En fait, vers 1858, le cimetière s’était avéré trop petit. La nature humide du sol, note l’abbé Plouvier, conserve les corps. Il avait fallu l’agrandir vers l’est et un peu vers le nord.

Pierre-Joseph Quenesson, pour 40 francs, avait arraché la haie vers l’est, pour en replacer une autre et arrangé les haies des trois autres côtés. Et, e, 1859, on avait ainsi pu bénir un nouveau calvaire dans le cimetière ainsi aménagé.

Sa translation n’eut lieu que vers 1883. Elle fut décidée à la suite d’un incident qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques. On sait que, dans presque tous les cimetières de France, se trouvait à l’écart un bout de terrain où l’on enterrait les gens qui mouraient après avoir refusé les derniers sacrements, les suicidés et les non-catholiques qu’il ne convenait pas de mettre en terre sainte ou bénite. C’était le fait pour le vieux cimetière de Caullery et c’est ce qui en accéléra peut-être sa translation dans un autre terrain situé en dehors de l’agglomération et qui est dans le cimetière actuel. Vers 1880, le gouvernement avait décidé de faire cesser cette discrimination, mais lorsque le samedi 2 décembre 1882 on enterra dans le cimetière un enfant protestant âgé de quinze jours, ce fut presque une révolution qui éclata dans la commune. Le maire dut faire appel aux gendarmes pour réprimer cette petite émeute, " des mères de famille furent arrêtées, un homme aussi qui fut reconnu comme le plus coupable ".

Tout cela fit hâter la translation en un autre terrain et suscita quelque animosité entre habitants. Mais le souvenir, maintenant, peut en être évoqué par les descendants des adversaires du temps, qui se sont alliés par mariage.

En tout cas, à l’ombre de la croix qui porte celui qui est mort pour tous, reposent maintenant dans le cimetière actuel les trépassés sans aucune discrimination et, fait qui étonnerait fort les auteurs de la délibération du 16 avril 1861, dans des caveaux, concessions à perpétuité, qui rivalisent dans leur construction et leur importance ; ce qui prouve au moins que les familles sont plus aisées qu’il y a cent ans ;

Pour loger le curé, du moins lorsqu’il résidait dans la paroisse, il fallait une demeure pas trop éloignée de l’église, comme il convenait. Ce fut le cas pour Caullery. Il semble bien, d’après le cadastre de 1811, que cette demeure ou presbytère, à quelque chose près, occupait le même emplacement qu’avant la Révolution, bien que, dans sa délibération du 6 juin 1844, le Conseil Municipal, pour obtenir une subvention du Sous-Préfet, fait état que la commune ait acheté un presbytère quelque dix ans auparavant.

Le cadastre de 1811, où le n° 109 du plan désigne le presbytère, maison comprenant 160 mètres carrés de superficie, et le n° 110 marque le jardin y attenant, contenant 21 ares 80 centiares, fait constater que le presbytère n’a pas changé de place. A la vérité, la maison du presbytère est figurée en bordure de la rue du bout de la ville.

En 1852, on entreprenait de le restaurer intérieurement, en faisant un entrefend entre la porte d’entrée et l’escalier, on plaçait trois armoires fixes, dont une au salon, et on mettait des volets neufs à quatre fenêtres.

En 1853, comme note encore l’abbé Plouvier, le Conseil Municipal votait 250 francs pour faire un four et une cuisine au presbytère, l’ancienne cuisine devenait place à manger ; on restaurait un bout de muraille à l’extrémité du bûcher, près la maison Laruelle.

En 1865, l’abbé Dayez note qu’on fit une muraille autour du jardin, et c’est en 1878 que fut faite la construction de la maison qui existe encore. Les quatre chambres du rez-de-chaussée, surmontées d’un étage de pareille dimension, furent bâties un peu en retrait de l’ancien presbytère dont la cave se trouverait sous le massif de rosiers placé devant la porte de la demeure.

L’emplacement de cette ancienne demeure du curé est bien reconnaissable dans un acte d’échevinage du 3 septembre 1689, où sa localisation ne peut être faite sur un autre terrain que celui qui lui est encore affecté.

Ce jour-là, devant le mayeur Paul Leducq et en présence des échevins Jean Du Bois, lieutenant mayeur, Jacques Lamouret, Gilles Payen, Jacques Labbé et Jean-Baptiste Mairesse, " un certain jardin et héritage ainsi qu’il se contient, clos de haie vifve y appartenant, tenant en lisière au presbitaire de la cure, d’autre au jardin de la cure et par devant au warescaye ", c’est-à-dire à la rue du Sac, est vendu par Robert Desmolin et Marie-Joseph Bricout, sa femme, demeurant à Cambray, à André Lamouret, " jeusne homme à marier ". On sait que la famille Bricout s’était réfugiée à cette époque à Cambrai, à cause des guerres qui amenèrent en 1677 la possession définitive de Cambrai et du Cambrésis par la France.

En 1789, grâce à cet acte de vente, se termina une discussion entre les possesseurs de ce jardin et les riverains. Cette pièce est encore plus explicite.

Le clerc du temps, J.-B. Trachet, qui était en même temps greffier de la communauté après avoir été échevin, a inscrit sur ce parchemin : " Lettre qui confirme le droit du jardin Jean-Baptiste Trachet et Anne-Marie Dufour d’être renfermé de haies vif appartenante audit jardin tenant au presbitaire dudit Caulery. "

Et cela parce qu’en 1788, le 12 novembre, ce jardin amazé de deux maisons appartenant à la famille Ramette faisait l’objet de partage devant le mayeur Pierre-François Lestoquoy et trois échevins, entre Alexandre Ramette, époux de Marie Trachet, la fille de Jean-Baptiste et Henry Ramette et Séraphine Labbé, sa femme, à qui Jacques-Joseph Ramette, leur frère, époux de Madeleine Hennino, cédait ses droits. Il recevait en échange une somme de cent écus payable en six termes, dont 10 écus " au jour du devoir ", c’est-à-dire le jour même de la solennité du partage devant le mayeur et ses échevins. Les acquéreurs devaient, en plus, garantir le viage de leurs père et mère. Alexandre Ramette avait " la juste moitié en lisière contre le presbitaire de Monsieur le curé ", Henry Ramette avait l’autre moitié, avec le noyer qu’il se réservait de couper après le décès de ses parents.

" Lesdits jardin et deux maisons main ferme tenaient d’une lisière au presbitaire de monsieur le curé, d’autre lisière à Maximilien Laude, d’un bout à la rue, d’autre bout au jardin Jean-Baptiste Boniface. " On reconnaît les anciennes demeures d’Alexandre Cacheux et d’Etienne Ramette, sur le jardin duquel fut bâtie plus tard la maison de Denis Pochet-Lorriaux. Maximilien Laude était le maréchal qui occupait l’emplacement des héritiers Louis Boniface, et le jardin J.-B. Boniface, qui devin après la Révolution la propriété des Laruelle.

L’abbé Augustin Soyez, originaire de Ligny, qui avait dû quitter à la Révolution son couvent de Prémontrés pour venir, en 1810, être curé de Caullery, avait l’habitude de s’asseoir sur las de la porte du presbytère, l’après-dîner, pour dire bonjour aux cultivateurs qui s’en allaient aux champs par le Bout de la ville. C’est ainsi que Calixte Décaudin avait appris de son grand-père Charles-Michel Bourlet qu’il avait ainsi bavardé familièrement avec ce vieux prêtre, dont l’habit à la française qu’il avait conservé, culottes courtes et soutanelle, n’était pas sans l’avoir étonné, car le costume ecclésiastique était, comme maintenant, la soutane descendant jusqu’aux talons.

Ce Charles-Michel Bourlet avait un fils, Elie-Joseph, qui, né en 1793, avait pris l décision de rentrer au Séminaire où il était déjà en 1810. Il est remarquable qu’avant la Révolution, la paroisse de Caullery n’ait fourni qu’un seul prêtre, F.-J. Mairesse, qui fait un baptême en 1734, par commission du curé Leclercq, et l’on n’est pas sûr du lieu de sa naissance. Peut-être faudrait-il en compter un second, Jean-François Lescouffe, dont les parents durent quitter Caullery à la fin du XVIème siècle, pour habiter Cambrai, dont ils deviennent bourgeois. Jean-François Lescouffe, qui mourut curé de Bouchain en 1673, avait conservé des attaches à Caullery, par ses terres qu’il louait ou vendait, ou par l’argent qu’il prêtait aux particuliers comme à la communauté.

C’est peut-être le désir de remplacer au service des autels son oncle par alliance, Hubert Claisse, devenu l’époux de M.-C. Déjardin, la sœur de Félicité, sa mère, qui poussa Jean-Baptiste Bourlet, né le 20 avril 1791 de Jacques-Joseph, à entrer au Séminaire, où il est déjà aussi en 1810. Ce fut un prêtre éminent, distingué, qui se fit à son époque une réputation méritée de botaniste par les travaux qu’il publia sur la flore du pays. Il mourut à Douai le 29 avril 1870, à la maison Sainte-Marie, où il s’était retiré après avoir été aumônier des prisons en 1843.

L’autre Bourlet, son cousin germain, Elie-Joseph, né le 24 avril 1793, de Charles-Michel et de Caroline Claisse, était au Séminaire aussi dès 1810. Ordonné prêtre en 1820, il mourait curé de Rombies le 4 avril 1871. Il avait été curé de Roeulx en 1839–1840 ; dès son ordination, en 1820, il avait été nommé vicaire de Bavai.

Un de ses petits-neveux, Timothée-Florimond Décaudin, fils de Madeleine Bourlet et de Charlemagne Décaudin, né en 1845, ordonné prêtre en 1870, décédait le 21 juillet 1924 à Gognies-Chaussée, dont il avait été le curé bien-aimé depuis 1886.

Après lui, l’abbé C. Thelliez, plus de trente ans après l’ordination de l’abbé Décaudin, entrait au Petit Séminaire de Cambrai en 1901 et devenait prêtre en 1920.

A ces prêtres, il faut ajouter le nom de Fernande Moity qui, sous le nom de Dame Ombeline, consacra aussi sa vie au service de Dieu au couvent des Dames de Flines, où elle est décédée il y a quelques années, et, plus récemment, une fille à Jean Décaudin, arrière-petit-neveu d’Elie Bourlet, qui s’est consacrée, elle aussi, au service de Dieu et des Pauvres.

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