XVIe

Le 13 décembre 1501, les registres capitulaires font mention d’un Barthélémy de CAULLERY, enfant de choeur de la Cathédrale, à qui le Chapitre accorde la chappellenie de l’autel Saint-Nicolas, à Carnières, vacantes par le décès de Jehan le Vaast et, le 22 novembre 1503, il lui concède une tunique, comme il l’a fait aux autres enfants de choeur (Ms 1064, f° 352, 483).

Un acte déchevinage de la poesté St-Géry du 22 avril 1508 (Ms 1408, Bibliothèque de Cambrai) nous montre Jacques de CAULLERY et Anthoinette Loppe, sa femme, citoyens de Cambrai, vendant la juste moitié et droit qu’ils ont en une maison et héritage, rue du Festu, dont l’autre moitié appartien à Lyon Galland, à cause de sa femme; il s’agit de la maison ayant appartenu à Jean de CAULLERY, dont Jacques est héritier par moitié.

Les Archives Communales de Cambrai (FF 237) signalent d’autre part Louise de CAULLERY, épouse d’Antoine Dubois, à propos d’une maison sise rue des Cordeliers, auprès de la Brasserie du Fer à Cheval, que l’on sait avoir appartenu à Pierre de CAULLERY, dont elle est sans doute la fille.

Les comptes de la ville de 1517, 1518 (CC 115, f° 24) mentionnent Gilles de CAULLERY, concierge de la maison de paix, c’est-à-dire gardien intendant de l’Hôtel de Ville, qui reçoit à l’occasion de ses noces une pièce de vaisselle d’argent, valant 27 livres 12 sols, offerte par Messieurs du Magistrat.

Un Jean de CAULLERY, puer altaris, enfant de choeur lui aussi de la Cathédrale, obtient du Chapitre, le 3 novembre 1542 (Ms 1070, f° 175), la faveur de recevoir un salaire entier de façon qu’il puisse, les jours ou les heures où l’on ne chante pas la messe, fréquenter l’école à la maison des Frères (on sait que l’Evêque Jacques Croy avait fait venir de Gand, en 1509, les Frères hiéronimites pour tenir le collège des Bons Enfants, jusque-là dirigé par des prêtres séculiers). Le 15 juillet 1546 (Ms 1070, f° 286), le Chapitre lui accorde par grâce spéciale de ne rentrer qu’après la fête prochaine de l’Assomption.

Le 28 septembre 1528, les registres capitulaires avaient signalé un Benoît de CAULLERY à l’instance duquel, devant le tribunal du Chapitre, le " clocqueman ", c’est-à-dire le sonneur de cloches, qu’il avait accusé, était déclaré contumace (Ms 1069).

Ce Benoît de CAULLERY, le 31 janvier 1550 (Ms 1071, f° 149), est créé tourier du Chapitre à la place de Mathieu Parent. Dans la hiérarchie des officiers du Chapitre, le tourier venait après le prévost ou bailli du Chapitre. C’était lui qui était chargé de l’entretien de la salle des plaids du Chapitre et de la garde des prisonniers détenus dans la Tour du Chapitre. A cause de Benoît, le Chapitre accorde à son fils Louis de CAULLERY, le 24 août 1551, la réduction de la moitié des droits seigneuriaux dus au Chapitre sur un certain domaine qu’il acquiert à Fontaine-Notre-Dame (Ms 1072, f° 209). Le 21 janvier 1552 (Ms 1072, f° 218), Benoît de CAULLERY est créé bailli du Chapitre pour faire une saisie demandée par l’abbesse de Prémy.

Aux plaids du Chapitre du 8 février 1553, Benoiît de CAULLERY apparaît comme homme de fief, et, le 28 juin 1554, Hermès de CAULLERY, qui fut un juriste apparécié de son temps, est cité avec lui comme homme de fief du chapitre (Ms 700, registre aux plaids du Chapitre, Bibliothèque de Cambrai).

Mais Benoît est négligent dans sa charge de tourier. Comme Alard de CAULLERY presque deux siècles auparavant, il a laissé échapper de la prisons certains détenus. Aussi le Chapitre, mécontent, le prive-t-il de cette fonction le 5 juillet 1557 (Ms 1073, f° 141).

On peut noter en passant que, le 18 septembre 1547, un Ambroise de CAULLERY, " Ghorlier ", demeurant à Bouchain, est condamné par le bailli du seigneur de Roeulx à verser 10 livres d’amende au profit de ce seigneur pour avoir " blessé et navret à Roeulx d’un cop de coulteau en l’épaulle un Jehan Merlyo, dit Hotin, cabaretier brasseur à Hordain " (A.D.N.J. 403/58).

En tout cas, Benoît semble être rentré en grâce auprès du Chapitre; le 28 janvier et le 25 février 1561, il apparaît aux plaids du Chapitre comme tourier; en février 1562, avec Louis de CAULLERY, son fils, il est homme de fief et, le 1er mai 1563, c’est comme prévost séculier, c’est-à-dire comme premier officier du Chapitre, qu’il préside les plaids de ce jour.

Louis de CAULLERY semble avoir été ce Louis de CAULLERY, l’ancien époux de Jeanne Mayeu, dont la fille Jeanne fut l’épouse de Marc Rosel (Inventaire des Archives de Sorval, DD 2).

Il est sans doute le père de Louis, appelé le Josne, qui, le 23 novembre 1588, achetait devant le bailli de l’abbaye de Saint-Aubert un fief de 4 mencaudées et demie, en la banlieu de Cambrai, auprès du chemin d’Awoingt. Le 28 février 1597, il achetait encore un autre fief de même contenance joignant au premier et à un autre de 4 mencaudées qu’il possédait par héritage (A.D.N. 36 H 165/3006, 3014). le 21 septembre 1590, avec Marie Desorins, sa femme, il avait acquis, au terroir de Lesdain, une pièce de terre de 2 mencaudées et demie, dépendant de la mairie de Crèvecoeur, située auprès du chemin qui maisne dudit Lesdain à l’abbaye de Vaucelles (A.D.N. 36 H 129/2297).

Homme de fief de l’abbaye de Saint-Aubert, Louis de CAULLERY est présent le 12 octobre 1591 à une vente de fief à Thilloy (36 H 564, f° 12). En la même qualité, il assiste, le 7 septembre 1608, en l’abbaye de Saint-Aubert, à la vente de la terre de Rieux faite par Loys Le Carlier à Claude de Hennin (36 H 566, f° 7).

Le fils de ce Louis de CAULLERY le Josne, qui s ’appelle aussi Louis, établi maître peintre à Anvers, où il est marié avec Marie Adrians, fait relief le 9 juillet 1613, devant le bailli de l’abbaye de Saint-Aubert, par l’entremise de Jean de Baralle, son beau-frère, qui est l’époux de Jeanne de CAULLERY depuis 1599, de deux fiefs de 4 mencaudées et demie de terre en la banlieue de Cambrai, qu’il a héritées de Louis de CAULLERY et de Marie Desorins, ses père et mère (A.D.N. 36 H 135/3919). Habitant toujours la ville d’Anvers, il vient de vendre ces deux fiefs le 17 décembre 1617, par devant également le bailli de Saint-Aubert, à Daniel Liévou, de Cambrai, pour 584 florins, " à l’avenant 66 florins la mencaudée " (A.D.N. 36 H 165/3203).

Il se trouve que de ces trois Louis de CAULLERY, deux au moins sont des peintres connus comme tels de leurs contemporains, dont l’un aurait à son actif une gouache représentant la Sainte Famille, dont Lefebvre (Mém. de Sté d’Emulation, 1867) parle avec une certaine faveur, et A. Durieux (Mém. de la même Société, 1873) dit qu’elle n’est pas sans mérite. L’autre, maître peintre à Anvers, qui n’est connu ni de Lefebvre ni de Durieux, a laissé au moins deux oeuvres de valeur, dont l’une intitulée " Bal sous Henri IV " se trouve au musée de Rennes et l’autre, qui représente une fête galante de même facture que la précédente, se trouve au musée de Cambrai (voir photo). 

 

 

Si Lefebvre (po. cit.) fait allusion à l’oeuvre " d’un certain Collery, peintre de son setille en même temps qu’à une sorte d’élégie faite par son ami Fourment ", Durieux (op. cit., 1873) est plus explicite. Grâce à l’obligeance d’une personne de Cambrai, dit-il, il a vu un album-recueil de sujets religieux, à la fin duquel se trouve une gouache représentant la Sainte Famille, portant la date 1594 et au-dessus un monogramme qu’il identifie comme celui de Louis de CAULLERY. Une sorte de pièce de vers qu’il qualifie " d’élégie faite par son amy Fourment fait connaître que ce recueil appartient à Loys de CAULLERY, peintre excellent de son vray stil et art ". Tout en regrettant de ne pas en savoir davantage sur ce peintre, il donne la date de sa mort, 1598. Plus tard, en 1889, revenant sur la même question, Durieux produit un fac-similé de signature de Louis de CAULLERY (n° 248) qu’il attribue au même personnage. Mais cette signature est toute différente de celle qui se trouve au bas du tableau du musée de Cambrai et ne semble pas non plus pouvoir être attribuée à celui qui a signé la gouache par un monogramme.

Or, avec les actes de vente conservés aux Archives Départementales, un autre Louis de CAULLERY, peintre à Anvers, a été retrouvé. Durieux comme Lefebvre n’ont pas prêté attention à l’auteur de l’élégie qui se dit l’ami de Fourment. Durieux avait pourtant signalé (p. 73 op. cit.) qu’au XVIe siècle nos peintres (cambrésiens) allaient à " Ampvers " chercher l’or fin. Mais pas davantage que Lefebvre il n’avait songé que Fourment avait été le nom de la seconde femme de P. Rubens, qu’il savait avoir fourni à Cambrai, au chanoine Sébastien Bricquet, la magnifique " Descente de Croix " que l’on peut admirer encore en l’église Saint-Géry.

D’autre part, on peut considérer que l’auteur de la gouache est peut-être Louis de CAULLERY l’ancien si l’on admet 1598 comme date de sa mort. En effet, le père du peintre d’Anvers, sans doute l’auteur de la signature dont le fac-similé est donné par Durieux, est encore vivant en 1608 (1) ; son fils ne relève qu’en 1613 les fiefs qu’ils a hérités de lui, et l’on sait que, suivant la coutume féodale, faute de ce relief dans l’année qui suit le décès, le détenteur nouveau du fief pouvait être déchu de ses droits.

        Pourquoi Louis de CAULLERY, qui signe son tableau de Cambrai " Louis de Cauleri fils inventa 1620 " s’est-il installé à Anvers ? A-t-il été attiré là-bas par le grand Rubens, a-t-il travaillé avec lui ? Sa éFête galante " de Cambrai est plutôt faite à la manière du XVIe siècle, bien que, par certains détails des personnages, elle semble annoncer la peinture en relief des grisailles de Geeraert d’Anvers, que l’on peut voir à la Cathédrale de Cambrai. Son oeuvre conservée au musée de Rennes, qui représente un bal qui se passe sans doute dans les salles de l’hôtel de ville d’Anvers, est de même facture.

    

        Quoi qu’il en soit, c’est grâce aux actes retrouvés aux Archives Départementales que nous pouvons identifier trois personnages qui portèrent l’un après l’autre, sinon en même temps, jusqu’en 1598 au moins, le prénom de Louis et que Lefebvre comme Durieux regrettaient, faute de documents, de ne pouvoir faire connaître davantage. Le premier Louis de CAULLERY serait mort, suivant Durieux, vers 1598; le second devait être mort en 1613 lorsque son fils Louis, d’Anvers, fit le relief de terres héritées de ses parents Louis de Caullery et Marie Desorins.

 

C’est aussi aux Archives Départementales (III 137/1485) que l’on voit un " Octavien de Caullerie, marchand demeurant en la ville de Vallenchiennes, faire le dénombrement à l’abbaye d’Anchin à cause de sa seigneurie du Troncquoy, d’un fief à simple hommage de 7 sols 6 deniers cambrésiens de relief quand le cas y eschet ", contenant deux mencaudées de terres au terroir de Ligny tenant à 3 muids de la cense de la Bruyère, aux terres de la cense du Troncquoy et à deux mencaudées de Jérosme d’Anneux. Octavien l’a acheté le même jour à Melchior Moncheaux et scelle son acte de dénombrement du sceau qu’il emprunte à Jehan Pinte, homme de fief.

D’autre part, le livre terrier de la baronnie de Crèvecoeur de la fin du XVIe siècle signale parmi les possesseurs de fiefs relevant de cette seigneurie Gillotin de CAULLERY, qui a un fief de 12 mencaudées au terroir de Fontaine-au-Pire, tenant au chemin de Frenesse (Caudry). Jean Pilloix, demeurant à Besaing (ancienne ferme aux limites des terroirs de Fontaine-au-Pire et Haucourt), qui a acquis de Jehan de CAULLERY le jeune un fief de 20 mencaudrées venant de Simon de CAULLERY. Andrieu de CAULLERY, qui possède à Clary un héritage tenant au chemin qui va à la Sottière et à la rue qui " maine à Saint-Quentin ", et Gilles de CAULLERY, qui possède 4 mesures de terres sur Abancourt.

                    

(1) le 28 juin 1611, Louis de Caullery et Marie Désorins, sa femme, se fondent un obit annuel en l’église Saint-Martin, par une rente annuelle de huit livres tournois à prendre dès l’année du trespas du premier décédant sur leur maison et héritage en la cité de Cambray où ils font leur demeure nommée la Cloche d’or, faisant face sur le marché, faisant coing de la rue des Balances et tenant à l’éritage Guillaume Lecouffe. La rente fut payée dès 1611 (Inventaire des titres des chartriers de l’église St-Martin par l’abbé Tranchant en 1771. Archives hospitalières de Cambrai, registre in quarto, Ms 17 p. 56). (retour)

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